ENVIRONNEMENT

Le petit mot de la Grenouille

Comme des générations de grenouilles avant moi, je vis très heureuse dans ma petite zone humide en bordure de rivière d'Etel. Ici la vie foisonne, il y a une diversité d'espèces : plantes, fleurs, insectes, batraciens, reptiles, oiseaux et mammifères. Et si quelque fois, l'un mange l'autre, je trouve cela naturel. Peut-être qu'un jour je finirai moi-même dans l'estomac d'une couleuvre à collier ou dans celui d'un héron. C'est la vie !



Dans ma zone humide, en période de pluie, l'eau monte beaucoup. Je pense que ça évite au village d'à côté d'être inondé. En revanche, l'été quand il y a la sécheresse, de nombreux animaux viennent s'abreuver ici. Même les humains viennent pomper l'eau, sans doute pour arroser leurs cultures ou donner à boire aux animaux.

De temps en temps, l'eau qui arrive ici par les ruisseaux ne sent pas très bon, mais après avoir séjourné quelque temps dans la zone humide, elle ressort propre pour aller se jeter dans la rivière. C'est la magie des plantes disait ma grand-mère. J'aime bien le printemps car souvent je vois les maître d'école et ses élèves venir étudier ici. Les enfants me font rire à poser des questions tout le temps. Pendant les vacances, ce sont les touristes qui viennent faire des photos, là je me sens une vraie starlette…..



Pourtant depuis quelques jours, je suis inquiète. Le propriétaire de la zone humide est venu avec un autre humain qui lui a proposé d'y mettre des gravats. Il dit qu'il est entrepreneur et lui fait miroiter qu'avec la forte augmentation du prix des terrains, une fois la zone comblée, il pourrait la revendre très chère à un promoteur. Celui-ci pourrait par la suite y mettre des résidences secondaires ou des mobile homes. Ce que je ne comprends pas, c'est qu'il existe déjà beaucoup de terrains sur la commune pour les construction des humains. Il serait même sûrement possible de trouver un lieu pour stocker et gérer les gravats. Alors pourquoi combler ma petite zone humide.

Hier un premier camion a versé son chargement de gravats, tuant plusieurs de mes sœurs. J'étais révoltée, triste et très en colère. Ce matin ça va mieux car deux autres humains sont venus, et ils étaient très furieux de voir que l'on avait déposé des gravats ici. Je les ai entendus dire qu'ils allaient tenter d'arrêter ce désastre. Cette nuit je vais prier très fort la déesse des grenouilles pour qu'ils réussissent. Je lui demanderai aussi d'essayer de rendre les humains plus sages et respectueux de leur environnement, mais là j'ai beaucoup moins d'espoir.


A méditer :

Mesdames et Messieurs, en un siècle, deux tiers des zones humides o­nt déjà disparu du territoire français. En détruisant l'environnement d'une petite grenouille, nous détruisons aussi le nôtre et celui que nous aurions dû confier à nos enfants…